
Jean-Marc Ferry agence une sortie de crise en zone euro. Il plaide une politique solidaire et ciblée : relance au Nord, discipline au Sud. Ce qu'il appelle les « tours de rôle keynésiens ».
Ancien professeur de philosophie et de science politique de l'ULB, Jean-Marc Ferry est aujourd'hui titulaire de la chaire de philosophie de l'Europe à l'université de Nantes. La question européenne traverse son œuvre : « Discussion sur l'Europe », avec Paul Thibaud (Calmann-Lévy, 1992), « La Question de l'Etat européen » (Gallimard, 2000), « Europe, la voie kantienne » (Cerf, 2005).
Le philosophe français Jean-Marc Ferry est titulaire de la chaire de Philosophie de l'Europe à l'Université de Nantes ; il donne par ailleurs deux séminaires à Paris-Sorbonne sous le thème général « Philosophie de la crise ». Un observateur précieux en cette période de gros temps que traverse l'Union.
COMMENT ANALYSEZ-VOUS CETTE CRISE QUI FRAPPE L'EUROPE ?
Disons que l'Europe est aux prises avec trois problèmes.
1) Problème de légitimation du projet européen, comme si le motif fondateur de la construction – la paix – s'était pour ainsi dire effondré avec le mur de Berlin. Cependant, la légitimation de relève est claire : la mondialisation : enrayer le risque d'une subversion des États par les marchés, du politique par l'économique. L'Europe est à la croisée des chemins. Quel est son rôle historique face à la mondialisation ? Adaptation économique ou reconquête politique ?
2) Problème de gouvernance économique, notamment en zone euro. On parle de « fédéralisme exécutif », un slogan qui fédère droite et gauche sur un malentendu. Les uns y voient une opportunité de transmettre les impératifs des marchés financiers aux budgets nationaux, les autres, une fenêtre pour des « Etats-Unis d'Europe », un fédéralisme fort.
3) Problème d'organisation des Pouvoirs publics de l'Union. Depuis Maastricht l'Union donne l'avantage au Conseil sur la Commission. La méthode intergouvernementale l'emporte sur la méthode communautaire. Un rééquilibrage est devenu nécessaire, si l'on ne veut pas d'une Europe néo-impériale, post-démocratique.
Les pays « sociaux-démocrates » grognent face à la politique d'austérité généralisée imposée par la chancelière Merkel. Ce qui est bon pour l'Allemagne n'est pas nécessairement bon pour le reste de l'Europe ?
Les Allemands exportent de façon offensive depuis dix ans, et la population a accepté de réels sacrifices de niveau de vie. Sous l'impulsion de Gehrart Schröder, ils ont souscrit au schéma des politiques de l'offre avec ses « désinflations compétitives ». L'industrie allemande a en outre fait le choix intelligent d'une spécialisation dans le haut de gamme. Cela réduit l'élasticité-prix de ses produits à l'exportation. On comprend donc que la chancelière soit inflexible sur une monnaie forte, voire surévaluée, outre que, symboliquement, l'euro prend le relais du deutsche mark.
Cependant, l'Allemagne a joué un jeu non coopératif et elle entend imposer aux « cigales » du Sud l'orthopraxie des disciplines budgétaires et monétaires. En dépit des convictions naguère affirmées de Nicolas Sarkozy, les États de l'Union se sont vu confisquer les outils de la politique budgétaire et monétaire, confiscation que l'Allemagne veut consolider par une inscription des « disciplines » dans les Constitutions nationales. Elles conviennent à sa situation dominante, mais elles sont inadaptées à la situation du Sud. Plus fondamentalement, est-il raisonnable d'agencer un pilotage automatique rigide à destination de sociétés nationales dont les situations sont fort hétérogènes ?
Cette doxa pourrait entamer la légitimité de la Commission jugée « aux ordres » de l'axe Berlin-Paris. On garde en mémoire, en Belgique, la rebuffade du ministre Paul Magnette envers le commissaire Olli Rehn…
La Commission doit jouer son rôle, mais elle a, en effet, un problème de légitimité politique. Il est clair qu'aucun commissaire, pas même le tandem Barroso-Van Rompuy, ne fait le poids contre « Merkozy ». Jacques Delors préconise un retour à la méthode communautaire. Je suis d'accord. Mais à deux conditions. La première, c'est que l'on renonce à la dogmatique du fait accompli et de l'engrenage irréversible, indiscutable. Justifiée en son temps, cette rhétorique est devenue inappropriée et même détestable…
Le duo Merkel-Sarkozy a, de fait, pris le pouvoir au sein de l'Union, au détriment de l'autre tandem, Barroso-Van Rompuy. Une situation temporaire, liée aux hommes et aux circonstances ou lourde et irréversible ?
« Lourde », oui. « Irréversible », j'espère que non. La seconde condition que j'évoquais serait que l'on réforme en profondeur le mode d'investiture du président de la Commission, faute de quoi il ne disposera pas de la légitimité politique requise pour assurer son autorité en tant qu'instance de coordination des politiques publiques des États membres. Imaginez que chacun des Vingt-sept se réunisse en Congrès et propose, chacun, un candidat à la présidence de la Commission ; que le Parlement européen en retienne dix, et que le Conseil en désigne un : la procédure serait suffisamment « dramatique » pour assurer un bon relais médiatique et procurer à l'élu une légitimité politique à hauteur de sa mission.
Certains plaident aujourd'hui pour « plus d'Europe » – dans le sens d'un véritable pouvoir central fédéral. Pour votre part, cette perspective vous laisse plutôt perplexe. Pourquoi ?
Nous devons cesser de raisonner comme si l'Union européenne était un État fédéral inachevé. Le principe de l'Union est la concertation des États membres, non leur subordination à un État supranational ; c'est la coordination de leurs politiques publiques, non leur soumission à un carcan uniforme. La création d'une vaste zone monétaire induit une spécialisation économique. Même avec la meilleure gestion de ses finances, le Sud était voué à enregistrer des déficits de ses balances extérieures. Tôt ou tard, cela se paie d'un endettement. Les chiffres significatifs ne sont pas ceux des balances budgétaires, mais ceux les balances extérieures. Celles-ci se sont dégradées, au Sud, alors qu'avant 2008 Espagnols et Portugais étaient meilleurs élèves européens qu'Allemands et Autrichiens, quant au respect des critères de convergence.
Le discours moralisateur tenu par les zélotes d'une austérité pénitentielle est mystificateur. Le scandale n'est pas du côté des indisciplinés mais des hypocrites qui savent que l'excédent des uns a pour corollaire le déficit des autres, ainsi qu'Helmut Schmidt l'avait fait remarquer à ses compatriotes : tout le monde ne peut pas être exportateur net, et si tous engageaient la fameuse rigueur, tous seraient à genoux, en pleine récession économique.
Or nous avons la chance d'être dans une Union riche d'un acquis communautaire. Être membre de la zone euro engage une coresponsabilité qui implique une solidarité. Aujourd'hui, le Nord possède les atouts d'une relance économique. Il devrait consentir à des déficits budgétaires calculés, afin que le Sud puisse engager sans dommages sociaux le nécessaire rééquilibrage de ses finances publiques. « Rigueur, oui. Austérité, non ! », clame-t-on depuis les sociétés civiles. C'est le problème actuel : comment engager, comme il se doit, une politique de rigueur, sans que cela doive impliquer une cure d'austérité ?
Si l'on raisonne sur le schéma du grand État, le problème est sans solution. Si en revanche on réalise que nous sommes plusieurs en coresponsabilité solidaire, alors la solution s'indique d'elle-même : oui, le Nord doit maintenant « relancer » l'activité, ce qui permettrait au Sud d'honorer les fameuses disciplines. Son économie sera, on peut l'espérer, tirée en avant dans la mesure des exportations induites par les relances du Nord. C'est donc non pas une politique économique commune qui se recommande en zone euro, mais une politique économique concertée, coordonnée en tenant compte des situations différentes, au Nord et au Sud, et en distribuant en conséquence des « tours de rôle » keynésiens : relances d'un côté, coordonnées à des restrictions de l'autre. Point besoin d'un État fédéral. Il suffit d'une autorité de coordination, qui soit politiquement légitime. C'est le problème institutionnel actuel.
RESUME DE DIVERCITY
ADAPTATION ECONOMIQUE OU RECONQUETE POLITIQUE ? .
Les uns y voient une opportunité de transmettre les impératifs des marchés financiers aux budgets nationaux, les autres, une fenêtre pour des « Etats-Unis d'Europe » : un fédéralisme fort.
Un rééquilibrage est devenu nécessaire, si l'on ne veut pas d'une Europe néo-impériale, post-démocratique.
Ce qui est bon pour l'Allemagne n'est pas nécessairement bon pour le reste de l'Europe ?
Merkel veut une monnaie forte, voire surévaluée, outre que, symboliquement, l'euro prend le relais du deutsche mark.
Cette doxa pourrait entamer la légitimité de la Commission jugée « aux ordres » de l'axe Berlin-Paris
Aucun commissaire, pas même le tandem Barroso-Van Rompuy, ne fait le poids contre « Merkozy ».
Cessons de raisonner comme si l'Union européenne était un État fédéral inachevé.
Le principe de l'Union est la concertation des États membres, non leur subordination à un État supranational ; c'est la coordination de leurs politiques publiques, non leur soumission à un carcan uniforme
Le scandale n'est pas du côté des indisciplinés mais des hypocrites qui savent que l'excédent des uns a pour corollaire le déficit des autres, ainsi qu'Helmut Schmidt l'avait fait remarquer à ses compatriotes : tout le monde ne peut pas être exportateur net, et si tous engageaient la fameuse rigueur, tous seraient à genoux, en pleine récession économique.
« Rigueur, oui. Austérité, non ! ». Comment engager, comme il se doit, une politique de rigueur, sans que cela doive impliquer une cure d'austérité ?
C'est donc non pas une politique économique commune qui se recommande en zone euro, mais une politique économique concertée, coordonnée en tenant compte des situations différentes, au Nord et au Sud, et en distribuant en conséquence des « tours de rôle » keynésiens.
BILL CLINTON : "REMETTONS-NOUS AU TRAVAIL"

Dans son nouveau livre, dont "Le Monde" publie les bonnes feuilles, l'ex-président américain s'en prend à trente années d'idéologie anti-Etat et en décrit les ravages.AFP/JUNG YEON-JE
Dans son nouveau livre, dont "Le Monde" publie en exclusivité les bonnes feuilles, l'ex-président américain s'en prend à trente années d'idéologie anti-Etat et en décrit les ravages.
Voilà ce que l'Amérique doit faire. Nous devons revenir au centre de l'économie de demain. C'est pour cela que la politique, si frustrante et si incohérente soit-elle, garde toute son importance. Au cours des trente dernières années, chaque fois que nous avons cédé à la tentation d'accuser l'Etat de tous nos maux, nous avons failli à notre engagement en faveur de la prospérité partagée, de la croissance équilibrée, de la responsabilité financière et de l'investissement dans l'avenir. C'est là que se trouve en réalité l'origine de nos problèmes.
Même avant la crise financière, l'économie n'avait produit que 2,5 millions d'emplois dans les sept ans et huit mois précédents ; le revenu moyen par famille après inflation était de 2 000 dollars inférieur au niveau qui était le sien lorsque j'ai quitté le pouvoir ; les inégalités de revenus et la pauvreté avaient augmenté, et les saisies hypothécaires explosaient. La quasi-totalité de notre croissance économique était alimentée par la construction de logements, la consommation de biens et la finance, tout cela reposant sur le crédit facile et sur un fort effet de levier. Nous perdions des emplois industriels chaque année. Les citoyens ordinaires faisaient chauffer leurs cartes de crédit pour maintenir la consommation à un niveau élevé, alors qu'ils devaient faire face à la stagnation des revenus et à l'alourdissement des coûts, notamment ceux de la santé, qui augmentaient trois fois plus vite que l'inflation.
Lorsque le gouvernement a renoncé à l'équilibre budgétaire en 2001 en faveur d'importantes réductions fiscales et de fortes augmentations des dépenses publiques, la dette nationale, qui était tombée de 49 % à 33 % du PIB dans les années 1990, est remontée à 62 % en 2010. La dette des consommateurs est passée de 84 % du revenu moyen dans les années 1990 à un taux record de 127 % en 2007. Depuis la crise, l'épargne a un peu augmenté et certaines dettes ont été effacées, mais l'endettement des citoyens américains représente encore aujourd'hui 112 % du revenu moyen. Ce n'est pas comme cela que je voulais voir les Etats-Unis entrer dans le XXIe siècle. (...)
La seule manière de faire perdurer le rêve américain entre nous et de demeurer le principal acteur du monde dans la recherche de la liberté et de la prospérité, de la paix et de la sécurité, c'est d'avoir à la fois un secteur privé, fort et efficace, et un Etat, fort et efficace, qui travaillent ensemble pour promouvoir une économie faite de bons emplois, de revenus en hausse, de plus d'exportations et d'une plus grande indépendance énergétique. A l'échelle mondiale, dans les pays qui réussissent le mieux, dont bon nombre affichent un taux de chômage plus bas, moins d'inégalités et, pour la présente décennie, un plus grand nombre de diplômés universitaires que les Etats-Unis, les deux coexistent. Ils travaillent ensemble, avec parfois des désaccords mais avec des objectifs communs. (...)
L'obsession anti-étatiste qui a toujours été la nôtre a fait la preuve de son efficacité dans le débat politique, mais les échecs auxquels elle a mené dans l'action politique se lisent dans une économie anémiée et de plus en plus inégalitaire, où les emplois sont trop rares et où les revenus stagnent, dans une moindre compétitivité par rapport à d'autres pays, notamment dans les domaines des produits manufacturés et des énergies renouvelables, et dans cette dette qui pèse sur nos épaules, potentiellement invalidante alors même que les baby-boomeurs commencent à partir en retraite.
D'autres pays, en revanche, ainsi que certains Etats et certaines villes des Etats-Unis, parce qu'ils se sont engagés à établir des réseaux de coopération incluant les secteurs public, privé et à but non lucratif, créent actuellement des ouvertures économiques et entrent dans l'avenir avec confiance.
Je ne veux pas dire ici que les démocrates ont toujours raison et les républicains toujours tort. Ce que je veux dire, c'est que, en fourrant tous les problèmes dans la camisole de force antiétatique, anti-impôts et antiréglementation, nous nous entravons nous-mêmes et nous nous empêchons d'effectuer les changements nécessaires, quelle que soit la quantité d'arguments qui nous inciterait à le faire. Le paradigme antiétatique nous rend aveugles aux possibilités qui existent en dehors de son test décisif idéologique et nous empêche de créer de nouveaux réseaux de coopération capables de rétablir la croissance économique, d'offrir des opportunités économiques à plus d'individus et à plus de secteurs géographiques et de développer notre capacité à entraîner le monde vers un meilleur futur.
Pour élaborer une stratégie efficace permettant de faire redémarrer le moteur de l'emploi et de résoudre le problème de notre dette à long terme, nous devons nous débarrasser des oeillères idéologiques antiétatiques et nous concentrer sur le rôle que l'Etat doit jouer dans le renouveau de l'Amérique. (...)
Les pays qui réussissent le mieux au XXIe siècle ont à la fois une économie solide et un Etat fort et efficace. Pour le prouver, ce qui est l'un des principaux objectifs de ce livre, je voudrais comparer les Etats-Unis, quant à leur histoire, à leurs attentes et à la manière dont ils s'en sortent, avec d'autres pays qui sont leurs concurrents de demain, aussi bien ceux qui sont déjà riches que ceux qui connaissent actuellement un développement rapide. Aussi étonnant que cela puisse paraître, on constatera qu'un certain nombre d'entre eux sont mieux classés que nous en termes d'éducation, de technologie, d'infrastructures modernes, de recherche et développement, et de production haut de gamme. Nombreux sont ceux qui affichent des taux de chômage plus bas, une croissance du nombre d'emplois plus rapide, des inégalités de revenus moindres et des taux de pauvreté inférieurs. Certains offrent même plus de possibilités à leurs populations défavorisées de gravir l'échelle économique pour intégrer la classe moyenne, évolution que nous connaissons sous le nom de rêve américain. Singapour, par exemple, île qui ne compte que 5 millions d'habitants et où le revenu par habitant est élevé et la fiscalité relativement réduite, a investi 3 milliards de dollars de fonds d'Etat, soit beaucoup plus que les Etats-Unis, dans le but de devenir le premier centre biotechnologique du monde. Les biotechnologies devraient permettre d'élaborer de nouveaux produits qui créeront des millions d'emplois dans les dix prochaines années. Ces dix dernières années, l'Allemagne, où le soleil brille en moyenne autant qu'à Londres, a dépassé les Etats-Unis en devenant le premier producteur et utilisateur de cellules photovoltaïques. Comment ? Grâce à des subventions et à des objectifs définis par l'Etat. Une étude réalisée par la Deutsche Bank a montré que, même en intégrant le coût des subventions économiques, les Allemands avaient bénéficié de la création de 300 000 nouveaux emplois. Les Etats-Unis ayant une population plus nombreuse, s'ils avaient adopté la politique de l'Allemagne, auraient créé plus d'un million d'emplois. Mieux encore, du fait de leur plus grande capacité à produire de l'énergie solaire, ils auraient pu en créer le double. (...)
S'il reste encore des militants antiétatiques pour me lire, j'entends déjà les contre-attaques qui se forment dans leur esprit : "Ce que veut Clinton, c'est une social-démocratie à l'européenne ! Il veut nous taxer à mort ! Il veut nous imposer trop d'Etat ! Il ne croit pas en l'exception américaine ! Il n'aime même plus l'Amérique ; sinon, il ne ferait pas étalage de tous ces mauvais chiffres !"
Tout cela n'a aucun sens. Quand j'étais gouverneur de l'Arkansas, j'ai augmenté les impôts pour financer l'éducation, mais j'ai soutenu la diminution de la fiscalité pour encourager la création d'emplois, j'ai supprimé l'imposition d'Etat pour 25 % de nos contribuables (les 25 % les moins riches) et j'ai maintenu notre fiscalité globale au deuxième rang le plus bas du pays, exactement là où je l'avais trouvé à mon arrivée. Dans les années 1980, l'Arkansas était l'un des rares Etats qui gagnaient des emplois industriels et il entraînait notre région dans la croissance globale du marché de l'emploi. (...)
Au XXIe siècle, le rêve américain nécessite des avancées que nous ne pourrons réaliser sans mettre en place des politiques gouvernementales efficaces, recouvrant des investissements directs, des incitations à accélérer la croissance des entreprises et de l'emploi et des partenariats public-privé permettant la création d'un environnement favorable à cette évolution. Que cela nous plaise ou non, nous avons devant nous un nombre important de tâches à accomplir. (...)
Il faut construire des infrastructures adaptées au XXIe siècle.
Des millions d'emplois pourraient et devraient être créés pour augmenter au maximum les chances des Etats-Unis de renouer avec la croissance et avec une meilleure qualité de vie au XXIe siècle. Si l'on regarde où va le monde et la vitesse à laquelle il s'y rend, il est évident que nous avons besoin de connexions à haut-débit beaucoup plus rapides, d'un réseau électrique intelligent, de ports et d'aéroports plus efficaces et d'une remise à niveau de nos anciens investissements dans les routes, les ponts, les chemins de fer et les systèmes d'adduction d'eau et d'évacuation des eaux usées. Le plan d'aide a consacré de l'argent au lancement de ces entreprises, mais en trop faibles quantités et qui ont déjà largement été dépensées. Les membres antiétatiques du Congrès et leurs sympathisants dans le pays prétendent que nous ne pouvons pas nous permettre de telles opérations. Ils ont tendance à oublier que l'"exception américaine" qu'ils soutiennent dans leurs discours s'est construite sur des entreprises visionnaires. Pendant la Grande Dépression, la Works Progress Administration et le Civilian Conservation Corps ont employé plus de 8 millions de personnes à la réalisation de projets qui nous sont encore utiles aujourd'hui. Un bon point de départ serait de voter la création d'une banque d'investissement dans les infrastructures telle qu'elle a été soutenue par le président dans son discours sur l'emploi. (...) Les investissements pourraient provenir aussi bien du secteur privé que d'Etats étrangers détenant d'importantes liquidités et recherchant un endroit sûr où les placer. C'est une bonne idée qui est en discussion depuis des années. De nombreux autres pays élaborent ou réalisent des projets grâce aux investissements privés. Tant que les résultats et la sécurité restent garantis à un haut niveau, nous devriial démocrate
Quelle sorte de futur souhaitons-nous ? Voulons-nous un pays où nous puissions travailler tous ensemble pour faire revivre le rêve américain et reconstruire notre classe moyenne ? Quel est le moyen le plus efficace pour y parvenir ? Avec une économie forte et un Etat fort travaillant main dans la main pour renforcer les perspectives, les responsabilités et la prospérité de tous ? Ou bien avec un Etat faible et des groupes d'intérêts puissants qui dénigrent la prospérité pour tous et encouragent sa confiscation systématique par un petit nombre jusqu'à sa disparition ? C'est pourtant ce que nous promettent à terme les tenants de l'antiétatisme et de l'idéologie du "chacun pour soi".
COMMENTAIRE DE DIVERCITY
CLINTON IV
Quand Obama devint président, on annonça un mandat Clinton III. Ce n’était pas tout à fait faux.
Et voilà que Bill Clinton sort aujourd’hui du bois et lance la campagne en faveur d’un Clinton IV.
Aussitôt Bill annonce la couleur : Clinton 4 ou Obama 2 se placera sous le signe de davantage d’Etat, autrement dit il prend le contrepied des thèses des Tea Parties et du parti républicain. Roosevelt 3 ?
« Au cours des trente dernières années, chaque fois que nous avons cédé à la tentation d'accuser l'Etat de tous nos maux, nous avons failli à notre engagement en faveur de la prospérité partagée, de la croissance équilibrée, de la responsabilité financière et de l'investissement dans l'avenir. C'est là que se trouve en réalité l'origine de nos problèmes. »
Plus social-démocrate que ça, on tire l’échelle. De quoi rendre Merkel verte de rage.
L'obsession anti-étatiste est carrément dénoncée par le mari de Hilary. Au vrai, la « sociale démocrate » du couple, c’est elle, comme on s’en rend compte en lisant ses mémoires et sa biographie.
« En fourrant tous les problèmes dans la camisole de force anti étatique, anti impôts et anti réglementation, nous nous entravons nous-mêmes et nous nous empêchons d'effectuer les changements nécessaires ». Autrement dit les Républicains ont tout faux.
« Le paradigme antiétatique nous rend aveugles et nous empêche de créer de nouveaux réseaux de coopération capables de rétablir la croissance économique et de développer notre capacité à entraîner le monde vers un meilleur futur. »
« Pour élaborer une stratégie efficace permettant de faire redémarrer le moteur de l'emploi et de résoudre le problème de notre dette à long terme, nous devons nous débarrasser des oeillères idéologiques antiétatiques et nous concentrer sur le rôle que l'Etat doit jouer dans le renouveau de l'Amérique. (...) »
Bref ce qui seul peut faire redémarrer sérieusement le moteur économique américain, c’est un New Deal à la Roosevelt.
Selon nous, cela est vrai aussi pour l’Europe. Mais c’est l’inverse de ce que proposent les gouvernements conservateurs au pouvoir.
Les Tea Parties et les républicains purs et durs sont persuadés que « Ce que veut Clinton, c'est une social-démocratie à l'européenne ! Il veut nous taxer à mort ! Il veut nous imposer trop d'Etat ! Il ne croit pas en l'exception américaine ! Il n'aime même plus l'Amérique ; sinon, il ne ferait pas étalage de tous ces mauvais chiffres !"
Ce qui est fascinant, c’est que Bill est totalement conscient des critiques de ses adversaires ! Et cependant il persiste et signe !
« Il faut construire des infrastructures adaptées au XXIe siècle. » C’est, selon nous vrai aussi pour l’Europe dont les gouvernements conservateurs ne jurent au contraire que par la rigueur et à la limite l’austérité ce qui tôt ou tard nous conduira au désastre de la déflation qui mit l’Allemagne à genoux à la fin des années trente.
Et pourtant, o paradoxe , la rigueur à la Merkel participe de la vieille hantise allemande de recréer les conditions qui ont facilité l’arrivée au pouvoir du fléau Hitler.
« Des millions d'emplois pourraient et devraient être créés pour augmenter au maximum les chances des Etats-Unis de renouer avec la croissance et avec une meilleure qualité de vie au XXIe siècle. »
Bill Clinton est conscient que le peuple américain a besoin de « connexions à haut-débit beaucoup plus rapides, d’un réseau électrique intelligent, de ports et d'aéroports plus efficaces de systèmes plus modernes d'adduction d'eau et d'évacuation des eaux usées. » On a débloqué des milliards pour sauver les banques ; pourquoi ne pas en débloquer dix fois plus pour moderniser nos équipements collectifs ?
Est-il complètement déraisonnable que ces objectifs deviennent aussi ceux de l’Europe en lieu et place d’une cure d’austérité ?
Et pourquoi ne pas dévaluer l’euro surévalué pour faciliter une reprise de l’économie et lancer un vaste chantier à la New Deal des deux côtés de l’Atlantique ?
« Quelle sorte de futur souhaitons-nous ? Voulons-nous un pays où nous puissions travailler tous ensemble pour faire revivre le rêve américain et reconstruire notre classe moyenne ? Quel est le moyen le plus efficace pour y parvenir ? Avec une économie forte et un Etat fort travaillant main dans la main pour renforcer les perspectives, les responsabilités et la prospérité de tous ? »
On aimerait entendre Dominique Strauss Kahn sur ces sujets sensibles plutôt que de le savoir en garde à vue pour des gallipèdes et pourquoi ne pas entendre aussi le très le très vieux mais tellement lucide Helmut Schmidt…
MG