C'est une bien triste nouvelle
Jean-Pierre Canon , prince des bouquinistes, a déserté son royaume lilliputien. Son bric à brac à la Ghelderode parfaitement rangé fleurait bon le papier d'Arménie. La "borgne agasse"- la plus belle enseigne qui puisse s'imaginer-. n'a point d'équivalent à Bruxelles, hormis peut-être "het ivoren aapje" face à la belle église du béguinage qu'anime son alter ego flamand.


Ultime incarnation de " l'antiquariat" comme disent les Allemands, il emporte au paradis des livres morts le souvenir des bouquineries d'antan, ces salons où l'on causait " bouquin", où s'enseignait entre amateurs bavards, éclairés, gourmands de découvertes, l'art du livre de seconde main qu'hante encore le souvenir du marquis Guy Impériali. L'homme qui dévorait un livre par jour n'en oubliait aucun et en parlait comme un sommelier étoilé de ses plus belles découvertes.
Cet ultime libraire, érudit du livre recyclé, cet homme délicieux, précieux comme un vase Ming, anarchiste malgré lui au regard infiniment bienveillant est irremplaçable, dernier survivant d'un Bruxelles de cartes postales ancienne aux teintes sépia.
Seul le très charmant et très humble bouquiniste de la rue de la Tulipe, grand amoureux de littérature pourrait, le cas échéant, prétendre occuper son siège derrière l'éternel bureau.
Les livres lus et relus sont en deuil: innombrables bouquins en attente d'une nouvelle vie.
MG
http://www.lesoir.be/archive/recup/jean-pierre-canon_t-19990301-Z0GFK9.html
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